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AlmanaBiGou...Le blog fait pour vous
3 mars 2012

Lettre de démotivation

Monsieur le DRH,

 

J’ai pris connaissance avec la plus grande attention de votre offre d’emploi en tous points remarquable, qualité ayant sans aucun doute grandement favorisé le fait que je l’ai remarquée.

Après avoir examiné cette offre dans ses moindres détails, je tenais à vous faire part sans plus tarder, il est déjà 23 heures, de ma réelle et totale non-motivation pour ce poste.

Jamais jusqu’alors un poste n’avait suscité en moi un désintérêt aussi profond, étant entendu que seul Jésus peut ressusciter et son poste est déjà pourvu. Sauf peut-être, un poste d’égoutier proposé dans ma prime jeunesse pour glaner quelques menus revenus, et pour lequel il m’a fallu prendre mon curage à demain.

Vous allez me demander et si vous ne me le demandez pas, je vous le dis quand même, c’est moi qui rédige : pourquoi tant de haine ? Qu’est-ce qui peut bien conduire un candidat respectable et respecté par ses pairs et par sa mère, moi, à un rejet tel qu’un chirurgien du cœur spécialiste des transplantations cardiaques en ferait une attaque ?

Et bien je vais vous le dire. Vous vous doutiez bien qu’en me posant cette question, j’allais vous répondre. Pourquoi vous aurais-je écrit cette lettre sinon, ne soyons pas ridicule !

Vous qualifiez le poste proposé de bonne situation, alors que, je tiens à vous dire, la situation de votre siège social à proximité du Père-Lachaise n’incite pas à une euphorie débordante.

J’ose espérer que les perspectives de carrière auxquelles vous faites allusion ne se limitent pas à des bureaux avec vue sur les pierres tombales.

J’ai bien noté la fourchette de salaires que vous proposez. Franchement ce n’est pas avec une fourchette pareille que l’on peut manger à sa faim tous les jours. Vous vous vantez d’être une entreprise en pleine croissance, et bien je peux vous dire qu’il est heureux pour eux que vos employés aient terminé la leur.

Vous n’avez pas le sens des réalités : avez-vous la moindre idée du prix d’une Aston Martin à l’heure actuelle ? Même sans les options, ce n’est pas avec un tel salaire que je pourrai remplacer la mienne. Votre sens des valeurs m’échappe.

Vous mettez en avant des possibilités d’évolution rapide. Je rappellerais à cet effet que la théorie de l’évolution conduit assez rapidement à la notion de mutation. Etant génétiquement assez stable, je suis foncièrement opposé aux mutations, notamment en Asie. J’ai un ami qui a été muté à Hong-Kong, il en est revenu complètement azimuté.

Sans vouloir me vanter, il est clair que ma non-candidature est une catastrophe pour votre entreprise.

Je possède une connaissance du bâtiment qui m’a assez vite conféré le statut de génie civil. J’en profite pour vous signaler que vous trouverez la statue du génie place de la Bastille.

Je suis pourvu, outre d’une paire d’oreilles assez proéminentes, d’un esprit de synthèse qui allie le synthétique au naturel.

Mon dynamisme est sans aucun doute à la hauteur du ressort de mes cahiers à spirales.

J’ai un goût certain pour le travail en équipe. Je suis doté à cet effet d’un sens du partage que le nonce apostolique m’envie : je distribue dans la joie et la bonne humeur ce qui peut être fait par d’autres, un vrai bienfaiteur.

Vous mettez en avant les capacités à animer un groupe. Les miennes sont avérées. J’ai récemment réussi à mettre en joie un ensemble de mormons en pénitence, en leur racontant l’histoire de l’âne qui pète quand on lui tire l’oreille. Et le tout, sans me faire tirer l’oreille.

Sans mentir, je suis passé maître dans le domaine de la convivialité et de l’entretien de l’ambiance de travail. Je saute sur toutes les occasions, et je ne parle pas de votre secrétaire ou de votre véhicule personnel même si les deux ne sont pas de toute première main, pour organiser un pot et nourrir cet esprit de corps que l’on ne retrouve plus que chez les scouts et les médecins légistes.

Mon esprit inventif donne sa pleine mesure dans ce domaine. Tout est prétexte à entretenir la flemme, pardon la flamme. L’anniversaire du premier échec de maternité d’une collaboratrice stérile, de la perte de la première dent de lait du tourneur-fraiseur, de la bataille d’Azincourt, de la mort du petit cheval : avec moi, l’ambiance ne faiblit jamais, j’ai toujours un pot au feu.

Et pour terminer en apothéose, on garde toujours le meilleur pour la faim, une compétence unanimement reconnu et notamment par Jacques Vabre et par ma grand-mère, je fais très bien le café.

Je suis bien conscient qu’après avoir lu cette lettre, vous allez tout mettre en œuvre pour infléchir un choix inexpugnable.

Mais ne vous faites pas d’illusion, même si vous me proposez un pont d’or, mais que ferais-je d’un pont d’or sans rivière de diamants, je ne reviendrai pas sur ma décision, pas plus d’ailleurs qu’à l’hôtel de la plage à Sartrouville où les coquillages n’étaient vraiment pas frais.

Je vous prie d’agréer, monsieur le DRH, l’expression de mes salutations les plus démotivées, ainsi que mon numéro de portable dans le cas où votre pont se muerait en viaduc.

Vu sur Des mots pour le rire

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Commentaires
H
...qui est dit et bien dit[mdr]<br /> Bon samedi Bigou
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